Hommage à Manu Dibango : le Collectif MDO et ses invités rendent hommage à une figure planétaire de l’afro-jazz
Personne mieux que le Collectif MDO, qui l’a accompagné à travers le monde pendant deux décennies, pouvait saluer la mémoire de Manu Dibango, disparu à 86 ans en mars 2020. Mais si la tristesse sera toujours dans les cœurs, on peut compter sur cette formation effervescente et sur ses prestigieux invités pour rendre un hommage joyeux à « Papa Groove » et à son répertoire généreusement fusionnel.
Débarqué en France à la fin des années 40, le natif de Douala au Cameroun a trimballé sa silhouette de géant et son saxophone des bals de campagne jusqu’aux scènes internationales les plus prestigieuses, passant à l’orgue derrière des chanteurs comme Nino Ferrer avant de prendre la tête d’un big bang au cours des années 60. Mais c’est à partir des seventies de Manu Dibango devient ce colosse solaire qui irradie jusqu’à l’Apollo Theater, dont il le premier Africain à fouler les planches laissées brûlantes par James Brown. En 1972, son Soul Makossa est dans toutes les têtes, jusqu’à se retrouver plagié des années plus tard par Michael Jackson et Rihanna.
Sa discographie, riche d’une quarantaine d’albums et musiques de films, traverse les continents comme les cloisons musicales, marquée par le panafricanisme et les échanges multiples avec les musiciens de son temps. Certains d’entre eux n’auraient manqué pour rien au monde cet hommage que Jazz à La Villette se devait de rendre à cet infatigable ambassadeur du groove, le 2 septembre à la Grande salle Pierre Boulez de la Philharmonie.
Collectif MDO
Très vite après la sidération qui a suivi la mort du « patron », le Manu Dibango Orchestra s’est remis en mouvement pour perpétuer l’héritage et conserver en mémoire vive (et « live ») l’œuvre du géant Camerounais.
Ce sont donc ses dix musiciens et choristes d’origines multiples, qu’il avait minutieusement choisis pour l’accompagner depuis 20 ans, qui mèneront la cadence pour ce concert hommage. Ils seront, à sa place, les passeurs ambianceurs pour une pléiade d’invités dont Manu aurait à coup sûr approuvé le choix.
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Angélique Kidjo – Chant
S’il n’en avait été empêché par le premier confinement, puis par la maladie, Manu Dibango aurait dû en mars 2020 célébrer les 60 ans d’Angélique Kidjo au Carnegie Hall de New York. Véritable « filleule » musicale du Camerounais dès son arrivée à Paris, la chanteuse béninoise à glorieusement suivi les traces de son illustre parrain en fusionnant toutes les musiques (de la rumba au funk en passant par le jazz et l’électro) et en collaborant avec des artistes du monde entier. Son dernier album, Mother Nature, salué planétairement, en est une nouvelle preuve éclatante.
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Cheick Tidiane Seck – Orgue, chant
« Manu Dibango abattu des montagnes pour la culture africaine » a réagi à sa disparition le multi-instrumentiste et compositeur Malien dont Dibango a souvent été le complice.
Adepte des grandes fusions (musique mandingue, jazz, soul, afrobeat) comme son ami, Cheick Tidiane Seck sera aussi là pour rappeler que Manu, qu’il surnommait « le grand baobab », fut aussi un organiste orgiaque dans sa jeunesse. Bisso, composition emblématique du Camerounais, est devenue une matrice lorsqu’il jouait dans les orchestres au Mali encore adolescent, et il n’a cessé de reprendre ensuite au cours de sa carrière internationale.
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Manou Gallo – Basse
Originaire de Côte d’ivoire, cette musicienne et chanteuse élevée par une grand-mère qui n’était autre que la cousine de Miriam Makeba a reçu très tôt le virus de la musique. Son premier groupe, Woya, traverse toute l’Afrique de l’ouest alors qu’elle est encore adolescente, et durant les années 90 elle se concentre sur la basse et décroche un premier fait de gloire en accompagnant Ray Lema. Elle intègre ensuite Zap Mama, qui lui ouvre une fenêtre sur l’Europe, puis sur le monde, et lui permet d’approfondir son art de la composition. A l’aube des années 2000, elle monte son propre groupe, Divo, avec lequel elle démarre une fructueuse carrière sous son nom, riche déjà de cinq albums. Son jeu percussif a été célébré par Bootsy Collins, Marcus Miller, et bien sûr Manu Dibango, invité sur son disque Afro Groove Queen. En 2021, elle s’est illustrée par une reprise de Lady, titre emblématique du Nigérian Fela.
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Blick Bassy – Guitare, chant
Grand Prix de la SACEM des Musiques du Monde en 2019, ce chanteur, auteur-compositeur, guitariste et percussionniste originaire de Yaoundé est l’une des plus belles voix à avoir émergé du continent africain au cours des dix dernières années. Certes, ce prodige camerounais a multiplié les expériences depuis son plus jeune âge, notamment avec la rencontre du jazz, de la soul et des rythmes bantoues au sein du groupe Macase, mais c’est à l’évidence depuis qu’il se produit sous son seul nom que son style épuré et émouvant a fait éclore les plus belles étincelles. Son dernier album, 1958, sorti en 2019, croule sous les récompenses internationales.
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Flavia Coelho – Chant
Née à Rio de Janeiro dans une famille originaire du Nordeste brésilien, Flavia Coelho est une boule d’énergie qui ne tient pas en place. Arrivée à Paris au cours des années 2000, elle a débuté sa carrière discographique au côté du Camerounais Pierre Bika Bika. On ne s’étonnera donc pas de la trouver dans cette troupe pour rendre hommage à Dibango, elle qui a élargi considérablement le spectre de la musique brésilienne en la mariant au ragga, à la chanson française ou à la soul. Elle a sorti en 2019 son quatrième album, le très offensif et engagé DNA.
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Par Christophe Conte